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Situation de la population naturelle

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La taille actuelle de la population girondine, ou plus largement de l’Atlantique Nord-Est, et celle d’un possible noyau relictuel en Mer Noire, demeurent inconnues. Cependant, en raison de leur déclin spectaculaire au cours des dernières décennies, le nombre d'individus adultes présents dans la nature est assurément devenu très limité, probablement de quelques centaines seulement.
 
Au cours de la première moitié des années 90, la population d'esturgeon européen de la Mer Noire pénétrant le fleuve Rioni pour s'y reproduire, ne se composait probablement déjà plus que d'environ 300 spécimens. Les efforts déployés pour capturer quelques géniteurs sauvages en vue de reproductions artificielles ultérieures, dans le cadre d’un programme de renforcement de population, sont néanmoins restés vains, aucun poisson n'ayant pu être récupéré avant que cette tentative ne prenne fin en 1998.
 
En France, les deux dernières reproductions constatées en milieu naturel remontent à 1988 et 1994 sur le bassin de la Gironde. Le nombre de juvéniles nés en 1988 a été estimé entre quelques centaines et plusieurs milliers d'individus. D'autre part, les recherches en génétique suggèrent fortement que la cohorte de 1994 provient d’un seul et même couple reproducteur. Ceci témoigne du nombre très faible de géniteurs sauvages encore actifs dans la nature, confirmé par une importante diminution de la fréquence des captures accidentelles signalées en milieu naturel : moins de 5 par an en moyenne ces dernières années contre plusieurs dizaines au milieu des années 80. L'espoir renaît pourtant aujourd'hui grâce aux succès des dernières reproductions artificielles qui ont permis notamment de libérer en 2007 et 2008 près de 100 000 alevins d'esturgeon européen sur le bassin girondin, dans les eaux de la Garonne et de la Dordogne.
 
En dépit des protections internationales dont bénéficie l'esturgeon européen et de son statut d’espèce protégée dans les eaux françaises et européennes respectivement depuis 1982 et 1998, et malgré les efforts significatifs entrepris en France depuis la fin des années 70, sa population reste dans une situation très précaire.
 
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Situation de la population en captivité

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L'esturgeon européen est désormais l’une des espèces de poissons les plus gravement menacées au monde. Les espoirs de restaurer sa population, fragilisée sur toute son aire de répartition, reposent aujourd'hui essentiellement sur le succès des projets de conservation ex situ. En effet, les mesures de sauvegarde destinées à réduire les menaces auxquelles la population naturelle est confrontée, bien qu'indispensables sur le long terme, ne permettront pas, à elles seules, de freiner le déclin de l'espèce. Les opérations de soutien de la population sauvage (lâchers d'alevins produits à partir du stock en captivité), grâce à la maîtrise de la reproduction artificielle, semblent la seule alternative capable à terme de renverser la situation et de sauver à terme cette espèce de l'extinction.
En France, 6 groupes d’animaux sont conservés en bassins à Irstea de Bordeaux. Depuis 2012, l'association MIGADO a la charge de l'élevage des individus adultes et juvéniles.
- 2 groupes d’origine sauvage (7 poissons nés avant 1994 et provenant de captures accidentelles +  21 poissons nés en 1994, voire 1995, en milieu naturel et échantillonnés juvéniles) ;
- 1 groupe de 8 individus issus d’une première reproduction artificielle en 1995 à partir d’un couple d’esturgeons venant du milieu naturel, portant à ce jour à 35 le nombre total d’animaux.
- 1 groupe de 800 poissons issus des reproductions artificielles réalisées de 2007 à 2014, donc un groupe de poissons issus des reproductions est conservé sur site pour renouveler le stock d'esturgeons captifs, et produire des futurs géniteurs.
Les chercheurs de Irstea savent faire reproduire des individus sauvages récupérés dans de bonnes conditions, bien que l’ovogenèse n’ait pas lieu tous les ans. La technique a déjà pu faire aboutir avec succès un programme expérimental de renforcement de l’espèce dans le bassin de la Gironde en 1995, de 2007 à 2014. Les connaissances ont évolué, et se sont améliorées en terme de conditions d’élevage optimales à offrir à ces animaux pour qu’ils puissent développer un cycle sexuel normal et fournir des produits de bonne qualité. En la matière, les difficultés pour obtenir des individus sauvages mâles et femelles simultanément et dans de bonnes conditions de maturité a constitué à ce jour une contrainte forte à l’amélioration des techniques de reproduction artificielle et d’élevage larvaire.
En Allemagne, à Berlin, 8 poissons issus de la reproduction artificielle de 1995 et 2200 poissons issus des reproductions artificielles de 2007 à 2014 provenant de Irstea de Bordeaux sont conservés à l’IGB pour constituer un stock enfermé et mettre en place des lâchers à différents stades dans l'Elbe (Leibnitz Institute of Freshwater Ecology and Inland Fisheries). Les travaux de ce laboratoire s’orientent principalement vers l’amélioration des conditions de reproduction en eau douce, l’étude des effets de la variation de la température, et l’échange de matériel biologique avec Irstea pour des études génétiques, histologiques et écotoxicologiques. Ces travaux doivent conduire à des renforcements futurs dans l’Elbe et le Rhin. En effet, il semble aujourd’hui exister des chances sérieuses de restaurer l’espèce en Allemagne, eu égard aux progrès faits en matière de lutte contre la pollution, et aux mesures envisageables pour limiter les effets de la pêche accidentelle et de l’aménagement des cours d’eau.
 
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Répartition actuelle & passée

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L’esturgeon européen était autrefois abondant le long des côtes maritimes et dans la majorité des grands fleuves européens, lui conférant ainsi une aire de répartition parmi les plus étendues. Il fréquentait alors la plupart des eaux côtières européennes de l’Atlantique Nord-Est (tout particulièrement les eaux peu profondes de la mer du Nord et de la mer Baltique) et, dans une moindre mesure, de la mer Noire et de la Méditerranée (dont la mer Ligure, la mer Tyrrhénienne, l'Adriatique, la mer Ionienne, le nord de la mer Egée et la mer Marmara). Des travaux sur le Rhône conduits par l’Association Rhône-Migrateurs-Méditerranée ont confirmé la présence historique de l'espèce sur ce bassin, à partir d’ossements et de spécimens naturalisés (Pagès et al., 2008).La présence de l’espèce a également été signalée dans les eaux côtières d’Islande et de la mer Blanche au Nord-Ouest de la Russie, ainsi que le long des côtes atlantique et méditerranéenne d’Afrique du Nord (notamment face à Casablanca, Oued Bou Regreg et Fedalla)
 
Les zones de reproduction de l'espèce, situées en eaux douces et confinées aux seuls bassins européens, concernaient en revanche plusieurs des grands fleuves de notre continent. Holcik et al. (1989) ont permis, sur la base d'un inventaire exhaustif des zones de présence de l'espèce, de délimiter l'aire de répartition historique de l'esturgeon européen. Jusqu'à son déclin amorcé à la fin du 19ème et au début du 20ème siècle, l'espèce colonisait plus de 30 bassins versants européens.

Distribution_1850_(Internet) Distribution_2008_(Internet)

Les effets cumulés de la dégradation des milieux naturels essentiels à l'espèce et d'une exploitation commerciale abusive du poisson, alimentant un marché florissant du caviar, ont, en moins d'un siècle, profondément influencé la disparition de la quasi totalité des populations d'esturgeon européen, et, de ce fait, l'étendue de l'aire de répartition de l'espèce.

Dans le milieu des années 70, deux populations reproductrices existaient encore, la première sur le bassin de la Gironde (France), la deuxième dans le Rioni, à l'est de la Mer Noire (Géorgie) (Ninua, 1976). La présence de l'espèce sur le fleuve Rioni s'est progressivement raréfiée pour devenir très incertaine. De récents travaux y ont par ailleurs montré une dégradation des conditions d'accès et de reproduction.
Par conséquent, l’hydrosystème français constituerait le dernier bassin européen accueillant ce que l'on peut encore appeler une « population », voire même le dernier bassin où l’espèce perdure encore. L'aire de répartition marine de cette population, limitée aux eaux côtières et aux fonds de faible profondeur, s'étendrait désormais depuis le Sud du Golfe de Gascogne jusqu'en Scandinavie ainsi qu'autour d'une partie des îles britanniques (Rochard et al., 1997). Aujourd’hui, l'esturgeon européen est une espèce en danger critique d’extinction (UICN CR A2d).

 

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Habitats essentiels

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Plus grand poisson migrateur amphihalin de notre continent, l'esturgeon européen réalise son cycle de vie successivement en eaux douces, saumâtres puis marines. L'esturgeon évolue essentiellement sur le fond, à la recherche de sa nourriture composée principalement d'invertébrés benthiques. Les informations relatives aux habitats fluviaux et estuariens de l'espèce, les plus récentes et les plus détaillées, ont été obtenues sur la bassin de la Gironde qui abrite les dernières zones de reproduction potentielles de cette espèce de la population naturelle d'esturgeon européen.

Les habitats d'eau douce de l'espèce se situent sur les parties basses des fleuves et se limitent aux zones de frayères des géniteurs, présents le temps de la reproduction, et aux zones de nourricerie, encore mal connues, des larves, alevins et juvéniles de l'année, progressivement attirés vers la zone estuarienne. Jego et al. (2002) ont déterminé les caractéristiques physiques optimales des zones de reproduction de l'espèce dans la Garonne et la Dordogne. Elles se situent dans des zones plutôt profondes (plus de 5 mètres) parcourues par des courants importants, sur des fonds de galets et de blocs.
 
 
Les eaux saumâtres des estuaires sont principalement fréquentées par les juvéniles (zones faiblement salées) et les esturgeons immatures (zones plus salées) au cours de leur phase de croissance. Elles constituent en outre une voie de passage obligé des adultes vers les frayères. Les travaux scientifiques menés sur l'estuaire de la Gironde ont montré l'existence de plusieurs zones de nourricerie (Rochard et al., 2001 ; Brosse, 2003) sur lesquelles les jeunes esturgeons se concentrent pour satisfaire leurs besoins alimentaires (Brosse et al., 2000 a & b). Ces zones vaseuses ou sablo-vaseuses de salinités différentes (5‰ à 25‰) se situent à une profondeur moyenne comprise entre 4 et 8 mètres (Brosse, 2003).

Les études entreprises sur la répartition de l'espèce en zone maritime ont montré, sur la base des captures accidentelles réalisées en mer, que les esturgeons européens, après avoir quitté les abords des estuaires (adultes et juvéniles de plus de 8 à 10 ans), se cantonnent aux eaux côtières du plateau continental de moins de 100 mètres de profondeur et principalement sur des fonds de moins de 40 mètres (Rochard et al., 1997).

La présence d’individus de grande taille a toutefois été constatée dans le passé à des profondeurs comprises entre 100 et 200 mètres dans l’Adriatique. La nature des fonds qu'ils affectionnent durant cette phase marine reste encore mal connue. Entre3 et 8 ans, les juvéniles font des allers-retours saisonniers entre l'estuaire et les zones cotiêres proches. Les scientifiques soupçonnent là aussi l'existence de "zones de concentration" plus riches en nourriture.
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Cycle de vie

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L'esturgeon européen est une espèce migratrice amphihaline anadrome à reproduction tardive, vivant la majorité de son existence en eaux salées (saumâtres puis marines) mais se reproduisant sur les parties basses, douces, des fleuves. D'après les récentes études menées sur l'écologie de la population naturelle du bassin de la Gironde, son cycle de viemontre l'existence de mouvements migratoires spécifiques à chaque stade de développement (Rochard, 1992; Rochard et al., 2001). Le cycle de développement d'Acipenser sturio, tel qu'il est suivi par la population girondine, peut être scindé en cinq phases:

1. Les esturgeons adultes acquièrent leur maturité sexuelle à partir de l'âge de 8 à 10 ans pour les mâles et de 12 à 16 ans pour les femelles. Le géniteur mâle semble alors apte à se reproduire tous les deux ans tandis que la femelle n'entreprend la montaison vers les zones de frai que tous les trois à quatre ans. La migration génésique depuis la mer jusqu'aux zones de frayère du bassin de la Gironde, en eau douce, se déroule au printemps, aux périodes de hautes eaux ; la reproduction intervient au cours du mois de mai et en début juin. Cette période de migration peut cependant varier selon les fleuves et la température (Magnin, 1962). Les circonstances du frai et le comportement des géniteurs n'ont, jusqu'à présent, jamais été directement observés.
 
 
 
2. Les oeufs fécondés qui dérivent et se fixent au substrat se développent en une dizaine de jours. Les larves, évoluant rapidement en alevins plus mobiles, séjournent en rivière à proximité des zones de reproduction pendant l'été suivant leur naissance. C'est l'une des phases les plus mal connues de leur cycle biologique (Jatteau, 1998).
 
 
 
3. Avec le rafraîchissement automnal des eaux, les jeunes esturgeons entreprennent progressivement la dévalaison vers l'estuaire. Ils y atteignent les eaux saumâtres durant leur premier hiver. Ils ont alors de 6 à 8 mois et mesurent déjà entre 20 et 25 cm. Leur descente jusqu'à la mer, avant la fin de leur troisième été, est parfois ponctuée de petites migrations estivales vers l'amont de l'estuaire.
 
 
 
4. Entre l'âge de 3 et 10 ans, les juvéniles effectuent des allers-retours saisonniers entre l'estuaire, où ils séjournent en saison estivale, et la zone maritime côtière périphérique de l'embouchure de l'estuaire en période hivernale. En Gironde, cette migration spécifique à l'espèce, était appelée "mouvée de la Saint-Jean" par les pêcheurs. Les détails et le déterminisme de ce phénomène sont encore inconnus mais sont vraisemblablement liés aux variations saisonnières des conditions de vie (températures et nourriture) de ces milieux.
 
5. A partir de l'âge de 8 à 10 ans, les esturgeons dits "subadultes" ou "pré-géniteurs" quittent complètement l'estuaire. Ils se répartissent sur le plateau continental marin, le plus souvent sur des zones où la profondeur n'excède pas 40 mètres. ils ne reviendront ponctuellement dans les fleuves qui les ont vu naître et grandir, qu'à partir de leur maturité sexuelle. L'esturgeon européen peut atteindre des mensurations impressionnantes de 3,5 mètres et plus de 300 kg, pour une espérance de vie supérieure à 70 ans. L'aire de répartition marine de la population française s'étend actuellement depuis le sud du golfe de Gascogne jusqu'en Scandinavie. L'Esturgeon européen entreprend ainsi des migrations de longue distance en mer (migrations de reproduction ou d'alimentation). Bien que ses itinéraires de migration soient peu documentés, l'esturgeon franchit les frontières nationales sur l’étendue de son aire de répartition. En témoignent les opérations de capture-recapture qui ont permis d'identifier en mer du Nord notamment des poissons marqués plus jeunes dans l'estuaire de la Gironde.
 
cycle de vie sturio 2016

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